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Le parcours emploi compétence remplace les contrats aidés

Le rapport de Jean-Marc Borello propose un dispositif plus sélectif avec davantage d’accompagnement.

Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Cette maxime d’Antoine Lavoisier a beau avoir été pensée pour la chimie, elle vaut aussi pour nombre de politiques publiques. Il en va ainsi des contrats aidés, dispositifs qui permettent aux personnes les plus éloignées de l’emploi d’être embauchées dans une structure publique ou privée pour une durée limitée, moyennant une subvention de l’Etat.

A leur sujet, Muriel Pénicaud, la ministre du travail, n’a jamais caché ses doutes : pour elle, ils ne permettent pas une insertion durable dans l’emploi et condamnent leurs bénéficiaires à les enchaîner avant de se retrouver à nouveau au chômage. Alors, elle a dit vouloir les supprimer afin de les remplacer par un autre système que le gouvernement juge plus efficace. C’est désormais chose faite. Mardi 16 janvier, les préfets ont reçu une circulaire enterrant définitivement le contrat aidé, désormais remplacé par le parcours emploi compétence (PEC).

Ce nouveau dispositif est issu d’un rapport, publié lui aussi mardi, commandé le 5 septembre 2017 par la ministre à Jean-Marc Borello, dirigeant associatif. S’il y a changement de nom, le nouveau dispositif ressemble en partie à l’ancien. La subvention est par exemple toujours présente.

Montrer patte blanche

C’est dans le principe d’attribution et dans l’accompagnement que se trouve l’évolution. Désormais, il y aura une sélection plus stricte des employeurs, qui ne pourront plus relever du privé mais uniquement du public. Une décision conforme à la loi de finances pour 2018, qui n’avait de toute façon pas budgétisé de contrats aidés pour le secteur non marchand.

« Nous avons étudié tous les dispositifs d’aide au retour à l’emploi et avons remarqué que ceux qui fonctionnaient avaient pour point commun une insistance sur la formation des publics, une bonne mise en situation professionnelle ainsi qu’un accompagnement accru. La réalité de l’insertion dépend en réalité de l’employeur et non de l’usager, explique M. Borello. Il ne s’agit pas de sélectionner l’employé mais l’employeur. »

Associations, collectivité territoriales et employeurs publics devront donc désormais, selon M. Borello, montrer patte blanche pour embaucher une personne dans le cadre d’un PEC. Seuls en bénéficieraient les employeurs qui s’engagent à former activement les salariés en question : « remise à niveau, préqualification, période de professionnalisation, acquisition de nouvelles compétences » sont autant de preuves de l’engagement de l’employeur, selon le rapport.

Un suivi plus intense

Autre exigence pour la signature de ce contrat : la mise en place d’un suivi plus intense du nouveau salarié avec une aide à la prise de poste en cas de besoin, une évaluation des compétences de l’employé, une aide à la construction d’un projet professionnel ou à la recherche d’un autre emploi à la sortie.

Pour que les choses soient claires pour tout le monde, et le poids de l’engagement bien pesé par l’employeur, le rapport suggère que l’entretien de la demande d’aide pour les PEC soit signé en présence du salarié mais aussi du prescripteur, en l’occurrence Pôle emploi. Ce dernier pourra, le cas échéant, mettre la structure qui veut employer un jeune dans ces conditions devant ses responsabilités. Et lui refuser la signature d’un deuxième contrat s’il estime que les exigences ne sont pas respectées.

Un bilan sera d’ailleurs conduit un à trois mois avant la fin du PEC. D’abord pour vérifier que l’employeur se plie bien aux engagements. Ensuite pour « identifier les blocs de compétences développés pendant l’emploi ». Le but est de les valoriser par la suite pour la recherche d’un poste plus durable si le contrat ne débouche sur rien. « Sur le volet formation et accompagnement interne, des obligations […] existent déjà mais elles ne sont pas toujours respectées », reconnaît cependant l’auteur du rapport, qui rappelle que l’entretien deux mois avant la fin d’un contrat aidé était déjà obligatoire mais quasi jamais réalisé.

Une somme à dépenser en fonction des besoins

Pour que l’effort enclenché avec la signature d’un PEC ne s’arrête pas la sortie, l’auteur du rapport suggère que l’accent soit mis sur la formation pour assurer un potentiel avenir à ce public fragile. 50 millions d’euros, issus du plan d’investissement en compétences, seront donc redirigés vers les bénéficiaires de ces contrats. Dix-huit mille sortants d’un PEC pourraient, dans ce cadre, bénéficier d’une formation de deux cent quatre-vingts heures.

Autre nouveauté, le financement. Inspiré du rapport, ce nouveau système assurerait aux préfets non pas un stock de contrats, comme c’était le cas auparavant, mais une somme à dépenser en fonction des besoins du bassin d’emploi. Le tout dans le cadre d’un fonds d’inclusion. 1,6 milliard d’euros pour 2018 (conformément à la loi de finances) que les préfets peuvent répartir à leur guise entre les parcours emploi compétence et les dispositifs d’insertion par l’activité économique tels les chantiers d’insertion. Ces derniers auront, d’ailleurs, eux aussi droit à 50 millions d’euros, issus du plan d’investissement dans les compétences, pour financer la formation. Reste à savoir si la chimie de ces nouveaux dispositifs va fonctionner.

 

Sarah Belouezzane | Le Monde | 16/01/2018

 

Le lien vers l’article:  http://www.lemonde.fr/politique/article/2018/01/16/le-parcours-emploi-competence-remplace-les-contrats-aides_5242401_823448.html#4F1Wg0Rz1GARqtwb.99

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