Un problème technique empêcherait la mise en place, dès l’année prochaine, du nouveau dispositif de soutien à la reprise d’activité.
Ce n’est pas un hasard si la fusion du RSA activité et de la prime pour l’emploi (PPE), maintes fois évoquée, n’avait jamais été lancée. Ce chantier, auquel a décidé de s’attaquer le gouvernement, est en effet «extrêmement compliqué», reconnaît un cadre de Bercy. Il tourne même au casse-tête, dans un contexte où les marges de manœuvre sont plus faibles que jamais, la France ayant dû revoir à la baisse ses prévisions de croissance, après deux trimestres sans progression. Et pourrait conduire à une réforme entrant en vigueur uniquement en 2016…
La principale difficulté consiste à mettre rapidement en place un nouveau dispositif destiné à inciter à la reprise d’activité. François Hollande a certes précisé que la fusion de la PPE et du RSA activité ainsi que la refonte du bas de barème de l’impôt sur le revenu (IR) – qui doivent remplacer la baisse des cotisations salariales censurée le 6 août par le Conseil constitutionnel – seraient engagées dès le budget 2015.
Mais rien n’indique que la mesure sera effectivement opérationnelle l’an prochain, alors que l’allégement des cotisations – qui visait à augmenter de 2,5 milliards le pouvoir d’achat des salariés modestes – devait prendre effet au 1er janvier. Soit dans quatre mois. Le gouvernement – qui cherche à rassurer l’aile gauche du PS, hostile à sa politique proentreprise – s’est jusqu’ici bien gardé d’évoquer cette possibilité, pourtant bien réelle. Manuel Valls devrait donner des précisions sur le calendrier la semaine prochaine.
Coexistence coûteuse
L’explication est simple: la PPE étant versée un an après l’année où sont perçus les revenus, elle sera encore distribuée en 2015 au titre de 2014. Cette aide devrait être supprimée dès le budget 2015, mais ne s’éteindrait qu’en 2016. Lancer le nouveau dispositif dès l’an prochain supposerait donc de le faire coexister pendant un an avec la PPE, ce qui entraînerait un surcoût non négligeable. Et ajouterait encore à la confusion.
Conscient que décaler d’un an cette mesure de remplacement brouillerait son message, le gouvernement, pressé par le temps, travaille à trouver une réponse. Il multiplie donc les simulations, qui dépendent notamment du montant qui sera en définitive alloué aux deux réformes (fusion et bas de barème), mais aussi de leurs modalités précises. «Les arbitrages ne sont pas rendus et tous les scénarios sont sur la table», explique-t-on à Bercy. Pour l’heure, l’enveloppe des réformes est comprise entre «3 et 4 milliards», selon une source gouvernementale, qui s’ajouteraient au coût actuel de la PPE et du RSA activité (environ 4 milliards).
Concentrer les moyens sur le bas de barème
L’équation est d’autant plus compliquée à résoudre que la fusion du RSA activité et de la PPE créerait «à moyens constants» des «perdants, y compris parmi les familles pauvres», souligne le rapport sur la fiscalité des ménages, publié en avril par le député PS Dominique Lefebvre et l’inspecteur des finances François Auvigne. Et ce, notamment si le futur dispositif perd tout caractère familial. Il faudrait donc consacrer des moyens importants pour compenser ces effets négatifs, et désastreux politiquement en période de «ras-le-bol fiscal».
Dans les scénarios envisagés, le gouvernement pourrait donc, tout en repoussant la fusion du RSA activité et de la PPE à 2016, décider que la hausse du pouvoir d’achat des salariés modestes passera essentiellement par la réforme du bas de barème, qui bénéficierait alors seule de 3 à 4 milliards. La réduction fiscale de cette année votée en juillet, qui profitera à 4,2 millions de foyers fiscaux et s’élève à 1,25 milliard, doit être «pérennisée» et «amplifiée» l’an prochain, via une remise à plat de l’imposition des premières tranches. La fusion de la PPE et du RSA activité aurait alors, à coût constant, pour seul intérêt d’apporter de la clarification au système actuel.