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France Travail : rencontre avec le haut-commissaire (VIDEO)

Le 1er février 2023, après plusieurs reports, nous avons enfin pu avoir un entretien en visioconférence avec Thibaut Guilluy, haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises. À ce titre, nous avons transmis nos interrogations et inquiétudes quand au sort réservé aux chômeurs et précaires avec le développement de France Travail…

La non intégration des concernés dans le processus, la dématérialisation, le fameux accompagnement de 15/20h des allocataires du RSA, les contrôles et sanctions… Voici les principaux sujets abordés lors de notre échange. Marie Lacoste, secrétaire générale du MNCP revient en vidéo (en bas de l’article) sur cet échange.

 

D’abord, un peu de contexte : où sont les personnes concernées ?

Le MNCP a participé à deux commissions sur neuf, sur le développement et l’expérimentation de France Travail. Ces deux commissions portaient sur l’accompagnement des allocataires du RSA et sur le contrôle et les sanctions. D’abord, précisons que ces commissions ont eu lieu en visioconférences à plus de 80 participants. Elles ont eu lieu trop vite, sans concertation. C’était de l’information descendante, sans possibilité d’échange. Enfin, si le MNCP a pu participer, c’est parce qu’il a fallu faire du forcing et « mettre le pied dans la porte ». Nous n’y étions pas invités, comme aucune autre organisation de chômeurs. Monsieur Guilluy nous a assuré qu’il n’avait pas été explicitement décidé de nous mettre à part…

 

Non à l’obligation, oui au volontariat

Premièrement, nous avons tenu à dire qu’il était impossible de mettre en place « France Travail » sans tenir compte des nombreux dispositifs déjà existants et mis en place par les collectivités locales. Entre les PLIE (plans locaux pour l’insertion et l’emploi) et les SPIE (services publics d’insertion à l’emploi)… Des efforts ont déjà été engagés.

Ensuite, nous avons alerté sur le caractère obligatoire des 15 à 20h d’accompagnement des allocataires du RSA. On nous parle de formation, d’accompagnement renforcé vers l’emploi, de coaching… Ces choses là sont déjà expérimentées avec le CEJ (contrat d’engagement jeune). Au vus des années d’expériences au sein des maisons de chômeurs dont font partie les associations du MNCP, il est pour nous inenvisageable de rendre cet « accompagnement » obligatoire. Il faut prendre en compte l’argent que ça coute aux allocataire de faire garder ses enfants pendant que l’on se rend à un entretien par exemple. Quid des frais d’essence ? etc… On préfère la base du volontariat.

 

Être exigeant envers les allocataires implique d’abord de balayer devant sa porte

De plus, cet accompagnement semble impliquer des exigences fortes envers les allocataires. Si tel est le cas, nous espérons que cela implique la même exigence auprès des institutions qui les demandent. Un grand nombre d’allocataires n’est pour l’instant pas inscrit à Pôle Emploi. Cela va demander un suivi MASSIF. C’est énormément d’agents qu’il faudra mobiliser pour assurer un accompagnement qui se voudrait qualitatif…

Aussi, il est hors de question pour nous que cet accompagnement à l’emploi soit en fait un tunnel de redirection vers les emplois non pourvus. Les allocataires du RSA ne doivent pas être les bouche-trous des secteurs en tension. Pour rappel, les emplois en tension le sont car les conditions de travail sont souvent difficiles, et très mal payés. Les allocataires du RSA sont déjà suffisamment en difficultés comme ça.

 

Alerte sur les contrôles et sanctions

Nous refusons que la généralisation du système de contrôles de Pôle Emploi dans le développement de France Travail. Celui-ci est un système trop dur contre lequel les chômeurs ne cessent de faire face au sein de nos associations, depuis des années. L’augmentation des contrôles et des radiations ces derniers mois est déjà très alarmante. On connait aussi déjà les dégâts considérables d’un contrôle sur les chercheurs d’emploi. Panique, dévalorisation, voir « criminalisation » car « mauvais chercheurs d’emploi »… La suppression du peu de revenus à un allocataire est une énorme violence. C’est une punition qui n’a jamais permis à qui que ce soit de « rebondir ».

 

Généralisation de l’utilisation du numérique ?

Dans le cadre du Contrat d’Engagement Jeune, une application a été développée. Là aussi, nous ne souhaitons pas la généralisation d’un tel dispositif. Ce qui semble apparaître comme une mesure de facilitation et simplification pour le gouvernement est en fait un obstacle de plus pour certains publics. Zones blanches, manque d’équipement ou tout simplement difficultés à l’utilisation d’outils numériques… Un tel procédé généralisé risque de laisser sur le coté un encore plus grand nombre de personnes déjà vulnérables et en grande précarité. Ce serait le départ d’une catastrophe sociale.

 

Des réponses peu satisfaisantes

Le haut commissaire a joué la réassurance. Le dispositif qui devrait être mis en place à partir de 2024 se basera sur les résultats de l’expérimentation de 2023. Nous nous questionnons sur les réactions des collectivités locales, conseils départementaux, chargés de faire appliquer sur le terrain les préconisations issues d’un gouvernement visiblement peu au fait du terrain. (puisqu’il n’invite pas le premiers concernés.) Beaucoup d’entre eux ont refusé l’expérimentation en parlant d’une réforme dangereuse.

Le MNCP et ses associations restent vigilants et suivent avec attention et inquiétudes la mise en place de l’expérimentation et le développement de telles mesures.

 

2 Responses

  1. Bravo Marie
    excellente video sur le projet France Travail
    félicitations pour votre argumentation qui me parait très cohérente face à un gouvernement qui ne négocie et n’écoute personne…
    cordialement
    clément

  2. Merci Marie,

    Oui, 80, vite et pas bien, mais en marketing c’est bien assez pour vendre, pour marchandiser les enjeux humains et sociaux, pour faire simulacre de concertation.
    Marketing ou foire sémantique où l’on trouve les France machin, France bidule, pour se gargariser de l’imaginaire exorbitant de maîtrise générale des enjeux et dossiers. Preuve leur héros National qui n’hésite pas à déclarer avoir « changé ». Vrai, avant il n’écoutait personne, à présent il n’a d’attention que pour le « projet!!! » qui gratifie les « jeunes qui rêvent d’être milliardaire » et, pour couronner le tout, aspirerons à solliciter son Excellence pour, « méritant dans tous les domaines d’activité », se voir octroyer la plus haute distinction nationale. Et l’on voudrait qu’à de telles hauteurs prises sur notre condition sociale, on n’y conçut pas la vue imprenable depuis la position de Haut Commissaire ? Non, on ne conçut point, tant nous savons que le « bénévobligatoire » est échantillon toxique de leur répertoire de pitances électorales. On a meilleur goût et manière qu’inspire l’Intérêt Général, le Bien Commun.

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